Dans l’imaginaire collectif, on a encore cette vision stéréotypée de l’athlète de force incapable de monter des escaliers sans être essouflé. Cependant, l’idée reçue selon laquelle le cardio et la force sont incompatibles a été remise en question ces dernières années avec l’avènement d’athlètes dits « hybrides » sur les réseaux sociaux. Alors qu’en est-il réellement? Le cardio et la force sont-ils réellement incompatibles? Dans cet article, nous explorerons la question, études scientifiques à l’appui.
Comment fonctionne l’endurance et la force?
Je prendrai ici l’exemple de la course à pied, une discipline que j’ai pratiquée et pour laquelle j’ai une expérience de coaching. Mais les concepts présentés sont généralisables à toute forme d’entraînement cardiovasculaire.
L’endurance se définit comme la résistance à la fatigue physique et psychique. Ainsi, compléter un marathon de 42.2 km est typiquement une épreuve d’endurance.
La force, quant à elle, est la capacité maximale d’un muscle ou d’un groupe musculaire à générer une contraction volontaire contre une résistance. Lorsqu’un powerlifter valide un Deadlift à 300kg c’est bien la force maximale qui s’exprime.
Pour mieux comprendre cette différence, il faut s’intéresser aux filières énergétiques. On distingue trois filières, dépendamment de la durée de l’effort, que l’on peut illustrer dans le graphique ci-dessous:

L’anaérobie alactique est la filière la plus performante jusqu’à 10 secondes d’effort. Ensuite, l’anaérobie lactique est privilégiée par l’organisme jusqu’à environ 2 minutes d’effort, moment où le métabolisme aérobie prend le relais.
Remarque: La production d’énergie par ces filières n’est pas successive mais simultanée, comme on peut le voir sur le graphique. Toutefois, chacune de ces filières produira à tour de rôle la majeure partie de l’énergie nécessaire à la contraction musculaire.
Ainsi, l’énergie nécessaire à la contraction musculaire pour une répétition au Deadlift sera principalement issue de la filière anaérobie alactiques, tandis que l’énergie nécessaire pour compléter un marathon sera majoritairement issue de la filière aérobie.
D’un point de vue musculaire, le développement de l’endurance se traduit par la croissance des fibres musculaires de type 1, dites « lentes », qui sont plus réceptives à la filière aérobie. Au contraire, l’entraînement de force développera principalement les fibres musculaires de type 2, dites « rapides », faisant appel à la filière anaérobie alactique.
Il peut donc sembler initialement contradictoire de chercher à développer simultanément la force et l’endurance. C’est d’ailleurs ce qu’avait conclu une méta-analyse de 2012, dont les résultats démontraient qu’un entraînement simultané de la force et de l’endurance résulte en une réduction des capacités à développer de la force [1].
Le hybrid training
Pourtant, il semble possible de développer à la fois force et endurance. C’est ce qu’ont démontré de nombreux pratiquants de CrossFit®, Hyrox® et autres athlètes hybdirdes qui gagnent en popularité sur les réseaux sociaux. Sont-ils une exception à la règle? Ou est-ce réellement possible d’améliorer ses capacités cardio-vasculaires tout en ayant des performances de force?
Ce que la méta-analyse de 2012 mentionnée plus haut décrit est ce que l’on appelle effet d’interférence. Il décrit une réduction des gains de force et d’hypertrophie lors de l’ajout d’un entraînement d’endurance à un programme de force.
Cependant, cet effet d’interférence est plus notable avec un volume important d’entraînement aérobie ou dans le cas où les entraînements cardio seraient en HIIT (fractionné à haute intensité).
Une méta-analyse plus récente, datant de 2022, a montré que l’entraînement de force induit une hypertrophie des fibres musculaires plus importante que l’entraînement hybride uniquement lorsque les séances de HIIT sont incluses. Lorsqu’il n’y a pas de séances de fractionné, aucun entraînement hybride n’a affecté l’hypertrophie musculaire totale par rapport à un entraînement de force seul [2].
Une autre étude de 2022 a également conclu que l’entraînement aérobie et de force n’interfère pas avec le développement de la force maximale et de l’hypertrophie musculaire par rapport à un entraînement de force seul [3].
Comment construire un programme hybride?
Il est donc possible de concevoir un programme d’entraînement équilibré qui permet le développement simultanéà de la force et de l’endurance. L’élément clé étant de maintenir un équilibre adéquat pour éviter le surentraînement.
Par exemple, pour un débutant, 3 séances de 30 minutes de musculation combinées avec 2 séances de course à pied de 15 minutes, permet déjà de totaliser les 120 minutes d’activité physique hebdomadaire recommandées par l’OMS.
Pour un athlète plus expérimenté, ces durées devront évidemment être augmentées. Il faudra toutefois tenir compte du stress supplémentaire de la course à pied dans le volume de votre programme. Je recommande donc de commencer en incorporant des sessions d’endurance courte et d’augmenter progressivement la durée et la difficulté.
Je vous recommande également de séparer vos entraînements d’endurance et de résistance en séances distinctes, afin de minimiser au maximum l’effet d’interférence.
Attention au principe de spécificité
Dans le cadre d’une préparation physique, l’un des principes que nous observons est le principe de spécificité. Ce principe décrit le fait que le corps s’adapte et performe pour ce à quoi on l’entraîne. Ainsi, un athlète sera plus performant en powerlifting s’il suit un programme de force plutôt qu’un programme de bodybuilding. De même, un marathonien sera plus performant s’il suit un programme de course plutôt qu’un programme de triathlon.
Ainsi, même s’il est possible de construire un programme hybride sans créer d’interférence, cela restera au dépend de la performance spécifique de la discipline. En effet, un athlète hybride pourra être à la fois fort et endurant, mais sera tujours moins fort qu’un athlète spécialisé en force et moins endurant qu’un athlète spécialisé en endraurance.
Conclusion
Bien que la force et l’endurance soient des qualités physiques distinctes, elles restent des composantes de la condition physique globale. Pour la plupart des pratiquants ayant pour objectif d’être plus en forme, l’intégration d’une activité aérobie dans un programme de musculation sera bénéfique.
Toutefois, la définition claire de vos objectifs est essentielle. Intégrer des séances de course à pied dans un programme d’entraînement peut être intéressant pour développer des qualités athlétiques générales. En revanche, le principe de spécificité nous apprend que si vous avez des objectifs spécifiques tels que compléter un marathon en moins de 3h30 ou remporter une compétition de powerlifting, la spécialisation dans un seul domaine sera nécessaire pour performer.
L’effet d’interférence est minime lorsque les séances d’endurance et de force sont séparées et que les activités cardio ne consistent pas en des séances de fractionné à haute intensité. Le principal risque réside dans l’accumulation excessive de fatigue pouvant conduire au surentraînement. Cependant, avec un programme bien construit et équilibré, ces risques sont atténués.
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Sources
[1] Wilson et al. Concurrent Training : A meta-analysis examining interference of aerobic and resistance exercises. 2012.
[2] Monserdà-Vilaró et al. Effects of Concurrent Resistance and Endurance Training Using Continuous or Intermittent Protocols on Muscle Hypertrophy. 2022.
[3] Schumann et al. Compatibility of Concurrent Aerobic and Strength Training for Skeletal Muscle Size and Function. 2022.